Cet article est issu du magazine Sciences et Avenir - Les Indispensables n°205 daté avril/ juin 2021.
Sitôt produits, nos aliments entament un inexorable processus de putréfaction sous l'effet des micro-organismes, de l'oxygène ou de la lumière. Un défi relevé par le génie humain grâce à diverses méthodes, à commencer par la chaleur.
La boîte de conserve est née en même temps que la stérilisation
La cuisson détruit les germes. Quant à la déshydratation, elle empêche le développement de micro-organismes dans l'eau contenue par les aliments. Le traitement de la viande par séchage serait attesté il y a 50.000 ans, dans la halte de chasse des Pradelles (Charente), où des traces de découpe ont été retrouvées sur des ossements de rennes, abattus ici en quantité par Néandertal. La déshydratation peut être aussi obtenue par la salaison, à sec ou en saumure, ou s'opérer par le sucre qui se lie aux molécules d'eau. Avec pour résultats les confiseries, harengs saurs et autres jambons.
Autre procédé de conservation, le fumage, qui combine à la déshydratation l'action des substances antimicrobiennes et antioxydantes présentes dans la fumée. À ces techniques séculaires viendra s'ajouter au 19e siècle celle du confiseur Nicolas Appert : il teste alors la conservation de denrées cuites dans des récipients hermétiques en verre, bientôt remplacés par des boîtes en fer-blanc, plongés dans l'eau bouillante. La boîte de conserve est née, en même temps que la stérilisation (entre 100 et 150 °C). La méthode de pasteurisation suivra, entre 62 et 88 °C, qui permet de réduire la quantité de micro-organismes sans trop dénaturer l'aliment.
La congélation stoppe l'action enzymatique des levures et moisissures
Le froid conserve, lui aussi, c'est bien connu. La conservation dans des puits, des grottes ou la glace est pratiquée depuis des milliers d'années. La Rome antique s'approvisionnait déjà en blocs de glace extraits directement… des glaciers. Toujours plus froid, la congélation à -20 °C stoppe l'action enzymatique des levures et moisissures ainsi que le processus d'oxydation. Mais en gelant lentement, l'eau contenue dans les cellules des aliments forme de gros cristaux qui finissent par les faire éclater, dénaturant les produits. La surgélation a permis, dans ce domaine, une nette amélioration.
Inspirée des pratiques des Inuits, elle consiste à maintenir les denrées à -40°C ou -50 °C entre cinq et quinze minutes, afin d'empêcher les cristaux glacés de se développer. La lyophilisation ajoute à cette congélation rapide l'élimination de la glace interstitielle par sublimation, soit un séchage par le froid. Ces procédés de conservation récents ont marginalisé la fermentation , aussi ancienne que la cuisson. Ce processus se déroule souvent sans oxygène et permet aux micro-organismes de transformer l'aliment par l'action d'enzymes.
Les technologies de pointe ne sont pas en reste
Par ailleurs, certains modes de stockage favorisent eux aussi la préservation des aliments. Dans les silos et les caves, les denrées les moins périssables peuvent être conservées plusieurs mois si les conditions de température, luminosité, humidité et taux d'oxygène sont maîtrisées. Les technologies de pointe ne sont pas en reste, à l'instar de l'irradiation, élégamment rebaptisée ionisation, qui soumet les aliments à un rayonnement gamma ou à un faisceau d'électrons de très haute énergie pour détruire les micro-organismes, ralentir le mûrissement et inhiber la germination.
Les nanoparticules, quant à elles, s'invitent jusque dans les aliments ou les contenants. Le projet NanoPack, financé par l'Union européenne, a ainsi permis de développer des films plastique dotés de nanotubes minéraux qui libèrent des huiles essentielles antimicrobiennes dans l'emballage, ralentissant l'oxydation, les changements d'humidité et la croissance microbienne. Résultat : un pain sans moisissure durant trois semaines.
Par François Folliet
Les différentes façons de conserver des aliments - Sciences et Avenir
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